Consultation

XIX, folios:282 283
Demurs, Pierre
M. de Gordes
Lettre non liée
14/12/1572
Grenoble
Toulouse

Transcription

Les mots surlignés font l'objet d'une note

1

Monseigneur, veu la commodité que présentement j’ay par le moyen de monsieur le

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chanoine Anselme que s’en retourne en Daulphiné, j’ay bien prins ceste

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hardiesse en vers votre seigneurie vous escripre la présente dequoy je

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vous supplie me pardonner. Ce n’est pas à vous à qu’il faille advertir

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des novelles pour rayson des troubles que nous avons mainctenant

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car je m’asseure que vous estes bien informé de tout ce qu’il se faict

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tant d’ung costé que d’aultre. Bien vous, plaira entendre qu’en ce pays

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de par deça, il y a le plus paouvre ordre que jamais ayt esté car tout

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le paouvre peuple est entièrement ruyné, mesmes tous les villaiges

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aux envyrons des villes come de cestecy et des circonvoysines.

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Les ungz massacrez, tuez et plilhes tant d’ung party que d’aultre que

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plus on en peult avoir, en façon que si Dieu n’y estend sa saincte miséricorde

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et bonté et illumyne ceulx que y doibvent mectre de l’hesbat et conduicte,

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se sera ung pays perdu. Je ne vous en discoureray plus avant me

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remectant à ce que vous en pourra dire cedit porteur de ce qu’il en a veu.

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Au demeurant, monseigneur, l’affection que j’ay au service de monseigneur

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de Sainct Sernin et le vostre me contrainct de rechief vous supplier

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de moyenner faire revenir de par deça monsieur d’Aiguebelle car

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il est plus nécessaire que jamais. Autmoins si plustoust ne

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peult estre que ce soit après cet yvert. Il y a plusieurs de ceste

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ville que luy escripvent de s’en venir et qu’il est bien nécessaire,

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mesmes monsieur d’Alières, juge de mondit seigneur et le procureur,

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aussy des chanoynes de ceste églize. Hier en mourus ung

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après avoir long temps malladie, qu’estoit chanoine et chantre

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dudit esglize. La chanoinie est à la donation du chanoine qui lors

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de son décès estoit sepmainier ; car c’est du reing et costé senextre

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et non de celluy de mondit sieur. Quant à la chantrerie, elle

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est bien à la donation de mondit sieur ; mais par les statutz et

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bulles de sécularité de céans, il ne la peult donner que à ung

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qu’il soit chanoine et qu’il soit capable et souffizant pour ce faire,

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dont n’en y a en son esglize que troys qu’il le sachent faire

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du nombre desquelz ledit sieur d’Aiguebelle est le premier

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et aultres foy la jà heu et tenu. Par ainsi, monsieur

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Mazet, comme vicaire en l’absence dudit sieur d’Aiguebelle,

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ne sachant à qu’il la bailher à homme chanoine plus

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souffizant et capable et en mains plus asseurées

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que audit sieur d’Aiguebelle pour en dispozer à la volunté de

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mondit seigneur de Sainct Sernin, l’en a prouveu et

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[v] pource qu’il est à craindre que si quelcun la demande

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à mondit seigneur ou en pensant tirer quelque proffict pour

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quelcuns de ses amys ou serviteurs, il la pourroit

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donner à quelque aultre, que me cause, monseigneur,

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vous en importuner de vous supplier, si le treuvés

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bon, en faire ung mot à mondit seigneur de vostre part, car

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il est à présumer que si la luy estoit pour la bailler

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à ung aultre ou qu’il vouloist en faire quelque réserve,

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il donneroit occasion audit sieur d’Aiguebelle de perdre

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ceste volunté qu’il a de retorner de par deça et de

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luy faire plus service et c’est chose que n’en importe

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rien à mondit seigneur et n’est de grande valleur, c’est la moytié

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du revenu d’une chanoynie ou environ, dont la chanoynie

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vault cinq cens livres pour an, à ceulx touesfoys qui

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les servent, car qui ne sertz bien ne prend et

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aussi ledit sieur d’Aiguebelle n’a aultre bénéffice

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en ce pays pour s’entretenir que sa chanoynie. Ce

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que j’en dye n’est point pour aulcune affection que j’aye à

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l’endroit de mondit sieur d’Aiguebelle et vous prie,

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monseigneur, ainsi le droire come la véritée est telle ;

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mais, cognoiscant la faulte qu’il faict à mondit sieur

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quant il n’est de par deça et en son esglize, me cause

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d’en parler en la façon et vous en dire ce qu’en est et

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à tant je feray fin, prieray le Créateur que à vous

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monseigneur, ensemble à madame et à tous les

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vostres, doient en bonne santé loongue et heureuse

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vie. De Thoulouse, le XIIIe jour de décembre 1572.

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Vostre à jamais très humble et très obeyssant serviteur.

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P. Demurs

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